Cas clinique 16
Jambe
Enfant de 5 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, avait été ramené aux urgences suite à un traumatisme ouvert de la jambe droite secondaire à un accident de la voie publique (piéton heurté par voiture).
L’examen avait noté un délabrement de la face externe de l’extrémité inférieure de la jambe et du pied gauche avec mis à nu des os.
2.Quel est votre diagnostic ? Interprétez la radiographie. Figure 1 R2
3.Quel traitement proposez vous ?R3
4.Quelles sont les complications à craindre ? R4
Réponse :
Conduite thérapeutique en urgence :
- premier parage aux urgences, lavage abondant au sérum physiologique, ablation des corps étrangers
- sérum antitétanique,
- traitement antalgique: paracétamol à raison de 60 mg/kg/j par voie rectale,
- anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS): Acide niflurique,
- antibiothérapie parentérale en intraveineuse, bactéricide débutée immédiatement en monothérapie
- immobilisation temporaire du foyer de fracture dans une attelle,
- demander une radiographie de la jambe
- laisser l’enfant à jeun
Vu l’ouverture cutanée, on propose un traitement chirurgical :
- sous anesthésie générale :
- - ablation des corps étrangers, brossage de la plaie à l’eau oxygénée, lavage abondant au sérum physiologique,
- - parage, suture et pansement antiseptique,
- - excision plan par plan des tissus dévitalisés,
- - fermeture cutanée sans tension,
- - réduction manuelle sous contrôle scopique à l’amplificateur de brillance,
- - contention du foyer de fracture par un fixateur externe. (Figure 2)
Réponse :
Réponse :
Différents types de complications peuvent survenir dans le temps :
- Les complications précoces locales : le syndrome ischémique post-traumatique des loges de la jambe.
C’est un œdème post-traumatique à l’origine d’une hyperpression dans les loges aponévrotiques de la jambe, responsable d’une ischémie tissulaire. Le diagnostic est évoqué devant des douleurs insupportables de la jambe à type de brûlures, une jambe turgescente et gonflée, une tension douloureuse des masses musculaires de la loge ischémique avec déficit sensitivomoteur (sciatique poplité externe +++). Aucun examen complémentaire n’est nécessaire au diagnostic et ne doit retarder le traitement +++. Ce dernier est une urgence thérapeutique+++. On procède à une ablation du plâtre et à une aponévrotomie de décharge des 3 loges de la jambe. Le patient est prévenu du risque des séquelles neurologiques.
- Les complications secondaires locales :
- -Complications cutanées :
- -Nécrose cutanée avec ouverture cutanée secondaire +++,
- -Porte d’entrée à l’infection secondaire,
- -Infection locale.
- -Déplacement secondaire : surtout pour les fractures traitées orthopédiquement.
- Les complications tardives :
- -retard de consolidation,
- -pseudarthrose aseptique,
- -ostéite chronique,
- -pseudarthrose septique,
- -cal vicieux
Commentaire :
Prévention antitétanique :
La prophylaxie antitétanique est obligatoire pour toute fracture ouverte, sauf cas de vaccination dument prouvée par le carnet de vaccination, datant de moins de 5 ans.
Dans le cas d’une plaie très contaminée ou vaccination datant de 5 à 10 ans un rappel vaccinal est indiqué.
Si l’immunisation date de plus de 10 ans, ou jamais effectuée, une immunothérapie avec vaccination sera indiquée.
Lavage :
Le lavage doit être entrepris en urgence dès l’admission de l’enfant. Ce temps comprend un savonnage avec rinçage et séchage des zones atteintes et saines au-dessus et au-dessous de la plaie.
Parage :
Temps important de la prise en charge des fractures ouvertes, consiste à l’ablation des tissus dévitalisés, il concerne le tissu cutané, sous cutané, fascias et muscles. Le parage du segment jambier doit être longitudinal et si possible en ellipse, de la superficie à la profondeur, le parage doit être complet mais économe, toute la graisse dévitalisée ou douteuse doit être excisée, tous les fragments osseux libres dévascularisés doivent être réséqués.
Commentaire :
- -Atteinte de l’artère poplitée ou l’une de ses branches est évaluée à 10% : il faudra rechercher les pouls avant et après toute manœuvre de réduction.
- -Lésion ligamentaire associée dans 50% des cas : touchant le ligament collatéral médial ou le ligament croisé antérieur.
- -Lésions neurologiques : les lésions du nerf tibial et du nerf fibulaire commun sont rares mais devront être recherchées systématiquement.
- -Ouverture cutanée.
Commentaire :
En présence de signes d’ischémie distale, la réduction sous anesthésie générale voire l’exploration sont une urgence absolue.
De même les fractures très déplacées devront être réduites rapidement même en l’absence de complications vasculo-nerveuses initiales.
Les fractures type I et II de Salter et Harris :
- Traitement orthopédique par immobilisation cruro-pédieuse après réduction sous anesthésie générale.
- En l’absence de réduction satisfaisante un abord chirurgical sera nécessaire : ostéosynthèse en croix ou vissage puis immobilisation cruro-pédieuse.
Les fractures type III ou IV de Salter et Harris :
- -Réduction anatomique généralement par arthrotomie.
- -Ostéosynthèse par vissage ou embrochage.
- -Lorsque la croissance résiduelle est non négligeable, l’ostéosynthèse respectera tant que possible le cartilage de croissance.
Il faudra évacuer les hémarthroses afin de soulager le patient.
Commentaire :
- -Epiphysiodèse: une lésion du cartilage de croissance occasionnera des troubles de la croissance à type de déviations axiales (tibia vara, valga, recurvatum) voire une inégalité de longueur des membres.
- -Cals vicieux: ils sont dus à une réduction incomplète d’où l’intérêt d’une surveillance radiographique.
- -Raideur articulaire: cette séquelle relativement fréquente en cas de fracture articulaire sera prévenue par une réduction anatomique et une rééducation appropriée après l’immobilisation.
- -Gonarthrose: Les fractures type III et IV ont un potentiel arthrogène.
Pour approfondir :
Classification de Cauchoix & Duparc :
- -classification fondée sur l’importance de l’ouverture cutanée qui met le foyer de fracture en communication avec l’extérieur,
- -évaluation instantanée sans signification évolutive +++,
- -elle ne tient pas compte des lésions sous-jacentes +++ (Une fracture évaluée Cauchoix II aux urgences peut être évaluée Cauchoix III après parage au bloc opératoire
-
CLASSIFICATION
CORRESPONDANCE ANATOMO-PATHOLOGIQUE
CAUCHOIX I
o - Ouverture simple : Plaie ponctiforme ou linéaire,
o - Sans décollement sous-cutané, ni contusion,
o - Ouverture typiquement de dedans en dehors,
o - Suturable sans tension après parage chirurgical,
o - Traitement de la fracture et pronostic identiques à ceux des fractures fermées.
CAUCHOIX II
o - Plaie large associée à une contusion et/ou un décollement,
o - sous –cutané, et/ou délimitant des lambeaux de vitalité douteuse,
o - Suturable après parage chirurgical,
o - Risque élevé de nécrose et d’ouverture cutanée en regard du foyer de fracture.
CAUCHOIX III
o - Perte de substance limitée ou étendue, cutanée et/ou musculo-aponévrotique.
o - D’origine traumatique ou secondaire au parage chirurgical,
o - Non suturable.
Pour approfondir :
L’épiphysiodèse est la complication la plus redoutable
Lorsque le pont est central, la conséquence est l’arrêt de la croissance, le raccourcissement est la conséquence d'un traumatisme survenu soit en cours de croissance soit un traumatisme violent avec un déplacement important. Le raccourcissement constitue la complication la plus redoutable. Il est le témoin d'une épiphysiodèse plus ou moins complète du cartilage de croissance. Cette épiphysiodèse peut être définitive et est d’autant plus grave que le décollement survient à un âge plus bas.
Lorsque le pont est latéral la conséquence est une déviation axiale. Elle est la conséquence d’une épiphysiodèse incomplète.
Au cours des lésions épiphysaires, l'épiphysiodèse s’observe surtout dans les fractures de type IV et V de Salter et Harris mais peuvent aussi se rencontrer, bien que plus rarement, dans les lésions de type III.
Références
- AFIF.
Les Fracture de jambe chez l’enfant.
Thèse doctorat médecine, Marrakech, 2012
- Chotel F, Bereard J, Parot R.
Fractures de jambe. In: Clavert JM, Karger C, Lascombes P, Ligier JN, Métaizeau JP, editors. Fractures de l’enfant.
Monographie du GEOP. Montpellier : Sauramps médical ; 2002.
Fracture ouverte de jambe chez l’enfant.
Thèse doctorat médecine, Rabat,2008,131 pages
- Peter G.Hope ,William G. Cole.
Open fractures of the tibia in children.
J Bone joint surg Br 1992;74-B:546-53
- Irwin , P. Gipson and P. Asheroft.
Open fractures of the tibia in children.
Injury, 1995,Vol.26,21-24, January
- J Stewart, G. Tytherleigh-strong, S.Brahathwaj and AA.Quaba.
The soft tissu management of children’s open tibial fractures.
J.R. Coll surg Edimb.44,Feb 1999.24-30
- G Jones, R.D.D. Duncan.
Open tibial fractures in children under 13 years of age: 10 years experience.
Injury, Int. J. care Injured 34 (2003) 776-780
- Adnan A. Faraj Anthony T.
Study of twenty-seven paediatric patients with open tibial fractures: the role of definitive skeletal stabilization.
Chinese medical journal (Taipei) 2002;65:453-456
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